5. Néphrolithotomie percutanée

Par le Professeur Eric Lechevallier – Hôpital de la Conception, Marseille

Près de 50% des calculs urinaires peuvent nécessiter un traitement urologique. Dix pour cent des calculs qui sont traités le sont par une chirurgie percutanée. La chirurgie percutanée pour calcul rénal dite néphrolithotomie percutanée (NLPC) a été introduite en France en 1983.

La chirurgie percutanée du rein s’applique essentiellement aux calculs durs ou complexes des cavités rénales, comme il est fréquent pour les calculs de cystine.

Technique standard

Anesthésie:

La néphrolithotomie percutanée est généralement réalisée sous anesthésie générale. Dans certains cas une anesthésie loco-régionale voire locale peut être proposée (patients ASAIII, deuxième temps par le même trajet).

L’antibioprophylaxie doit être systématique. Pour les volumineux calculs infectieux, une bi-antibiothérapie peut être débutée 8 à 10 jours avant la NLPC.

Position

Classiquement, après montée de sonde urétérale 1ère, l’intervention est réalisée chez un patient en décubitus ventral.

 

Repérage

L’intervention et notamment la ponction du rein est réalisée sous guidage radiologique ou échographique.

Site de ponction

Le point de ponction est situé dans le dos. Le site de ponction idéal doit être le fond caliciel postérieur et inférieur. Il est le mieux axé par rapport à la surface cutanée, permet d’atteindre le calice inférieur, le bassinet, la tige calicielle inférieure voir le calice supérieur. Il comporte peu de risque vasculaire car il est à distance des axes vasculaires.

Dilatation du trajet

Après la ponction un guide est placé dans les cavités rénales ou descendu dans l’uretère.

Le trajet est progressivement dilaté.

Dans tous les cas les instruments de dilatation sont mis en place sur le guide placé dans l’uretère lombaire ou dans le rein.

Après dilatation le trajet est matérialisé par une gaine à usage unique, afin de travailler dans le rein à basse pression.

Néphroscopie

Les calculs de moins de 15 mm peuvent être extraits en un seul bloc.

Durant la néphroscopie, les cavités sont irriguées par du sérum physiologique à la température ambiante ou du patient. Le volume d’irrigation doit être surveillé pendant l’intervention.

Lithotritie

Afin d’éviter de laisser des fragments résiduels les calculs doivent si possible être extrait en monobloc . Si une lithotritie est nécessaire (85% des NLPC) , les ultrasons avec aspiration sont le plus souvent utilisés.

Drainage urinaire

Un drainage urinaire par néphrostomie (18 Ch) ou sonde urétérale est le plus souvent utilisé.

En général la sonde urétérale est enlevée le jour même ou le lendemain et la néphrostomie à la 48ème heure après une épreuve de clampage ou un contrôle pyélographique.

Dans les cas idéaux un simple drainage est suffisant.

Durée opératoire

Les durées opératoires moyennes sont de 48-150 mn en fonction du type (volume, localisation, topographie, lésion associée) de calcul à traiter.

Lors d’une NLPC il est recommandé de ne pas dépasser un temps de travail de plus de 2 heures.

Durée moyenne d’hospitalisation

La durée moyenne d’hospitalisation en France est de 6-7 jours.

Les activités professionnelles peuvent être reprises à partir du 15ème jour post-opératoire. Les activités sportives ne sont pas recommandées avant 3-4 semaines.

Complications

Le taux global de complication (échec, complications) après néphrolithtotomie percutanée est de 26% .

Le taux de complications mineures de la NLPC est de 10%.

La morbidité grave est de près de 3%. Les facteurs de risque de morbidité sont le manque d’expérience, les particularités anatomiques du patient et une technique inadaptée.

Le taux de mortalité est de 0,05-0,1%. Les causes de décès sont infectieuse, hémorragique ou anesthésiologique.

Le taux de néphrectomie est faible 0-0,2%.

Complications hémorragiques et vasculaires:

Les principales complications sont hémorragiques.. Le risque transfusionnel est de 0,4-10%. Le risque transfusionnel est plus important pour les calculs coralliformes, 10%. Une hémorragie peropératoire peut nécessiter l’arrêt de l’intervention. En cas d’hémorragie artérielle, une artériographie rénale avec embolisation sélective est réalisée. Le taux d’hémorragie nécessitant une embolisation est inférieur à 1%. En cas d’échec une intervention chirurgicale d’hémostase peut être nécessaire.

Le taux de fistules artério-veineuses est de 0,002-1%. Elles sont diagnostiquées et sont traitées par artériographie et embolisation sélective.

Les hématomes péri-rénaux sont probablement fréquents (2-15%) s’ils sont recherchés. Ils sont généralement sans gravité.

Les complications urinaires :

Les plaies de la voie excrétrice sont plus fréquentes mais le plus souvent sans gravité. Le taux de perforation pyélique est de 3-6% des cas. Lorsqu’elles sont importantes, elles nécessitent l’arrêt de l’intervention, un drainage urinaire prolongé et une pyélographie avant ablation du drainage urinaire (4ème jour).

Les fistules urinaires cutanées à l’ablation de la néphrostomie sont rares, 1-2%. Les fistules urinaires prolongées ou abondantes nécessitent un drainage urétéral.

Les sténoses urétérales sont exceptionnelles, de l’ordre de 0,5%.

Les lésions des organes de voisinage :

Les lésions des organes de voisinage sont rares lors d’abord caliciel inférieur (foie, rate) (0,01%). Les plaies coliques sont observées dans 0,2-1% des cas . Les plaies coliques sont en général sont traitées par jeûne digestif, antibiothérapie, drainage urinaire et drainage rétro-péritonéal par le drain de néphrostomie. Le drain de néphrostomie est progressivement enlevé à partir du 8ème jour.

La morbidité thoraco-pulmonaire est de 0,4%.

Les complications infectieuses :

Le risque infectieux grave (septicémie) est de 0,1- 0,2 % (13) et le risque de bactériurie de 10%. L’intervention doit être réalisée avec des urines stériles ou du moins sous antibiothérapie pour les calculs infectieux pour lesquels la durée opératoire doit être inférieure à 1 heure.

La NLPC est une intervention peu douloureuse en dehors de la tolérance des sondes urinaires. Une douleur rénale post-opératoire doit faire rechercher une obstruction de la sonde de drainage rénale, un déplacement de la sonde de néphrostomie.

Résultats

En dehors des calculs coralliformes ou complexes ramifiés, le taux de sans fragment en 1 séance de la néphrolithotomie percutanée est de plus de 75-90%. Avec une 2ème séance à quelques jours d’intervalle par le même trajet, le taux de sans fragment est de 94%.

Pour certains calculs complexes une 2ème séance par le même trajet peut être réalisée éventuellement après une séance de lithotritie extra-corporelle. Dans ces cas le taux de fragment pour les calculs complexes est de 80%.

Le principale cause d’échec de la technique est l’impossibilité d’extraction du calcul. En dehors des échecs d’extraction du calcul, le taux d’échec de la NLPC est de 4%. La principale cause d’échec en dehors de l’impossibilité d’extraction du calcul, est d’ordre technique, essentiellement : échec de ponction (1,6%), impossibilité d’atteindre le calcul (1,2%), hémorragie (0,8%), impossibilité de dilatation (0,2%) ou perte du trajet de ponction (0,1%). L’obésité ou une malformation rénale sont des facteurs favorisants d’échec.

Avec la diffusion de l’urétéroscopie souple laser, la néphrolithotomie per-cutanée est devenue une technique de moins en moins indiquée.